Download this article as an e-book
Wissembourg-Obersteinbach
28 avril 2017
Voici une vidéo retraçant la deuxième étape d’un cheminement à travers la France, de la frontière allemande au nord de Strasbourg à, ( peut-être un jour!), la frontière espagnole au sud de Perpignan. Dans cette longue marche, mon attention se porte en premier lieu sur les paysages, leur protection et leur reconquête éventuelle ainsi que sur la biodiversité et sa reconquête.
Dans cette étape de moyenne montagne où les forêts sont somptueuses et les ruines de châteaux-forts innombrables, je croise un écureuil, toute une famille de sangliers et je pense avoir vu un loup ! Moments fabuleux…
Voici le texte de cette vidéo
Vendredi 28 avril 2017
Wissembourg – Obersteinbach
Lorsque l’alarme se manifeste brutalement à 6h30, ce sont mes pieds qui me préoccupent instantanément. Ils réagissent correctement sans m’humilier lorsque je descends prendre le petit-déjeuner servi avec sollicitude par Solange Schneider qui s’inquiète de la longue route qui m’attend, 30 km comme hier, et pour la même raison, faute d’hébergement. Sous un franc soleil matinal, je traverse les quartiers pittoresques de Wissembourg qui se réveille paisiblement. Je m’élève au milieu des champs de colza et de vignes et c’est à l’orée de la forêt qu’interloquée, je distingue très nettement une bête qui semble errer à une cinquantaine de mètres de moi. Ce n’est pas un chien, c’est évident. Un renard ? Mais il est gris et surtout bien trop grand. Et si c’était un loup ? Un vieux loup qui s’aventure près des cultures et des fermes ?
Des recherches sur Internet m’apprennent qu’un loup a été vu en janvier dernier sur la commune de Sparsbach dans les Vosges du Nord et qu’il peut s’agir du loup signalé à la fin de l’été 2015 dans la forêt du Ludwingswinkel en Allemagne, à moins de cinq kilomètres de la frontière française, près d’Obersteinbach, ce village proche où j’arriverai ce soir. J’apprends également que dans le département du Bas-Rhin, le réseau lynx existant a été étendu à l’espèce loup. Ce réseau est animé par l’Office National de la Chasse et de la Faune Sauvage. La préfecture du Bas-Rhin rappelle que le loup et le lynx sont des espèces strictement protégées en France, comme en Europe.
Quelques kilomètres plus loin c’est toute une famille de sangliers qui débouche devant moi, à quelques mètres seulement et qui dévale la pente, coupant le sentier, la mère en tête, suivi de toute une ribambelle de marcassins ! Quel spectacle ! Identique à celui de mon enfance dans la forêt ardennaise. Et le festival se poursuit avec un écureuil furtif qui s’évapore illico dans les cimes et disparaît dans les airs. Tout en continuant une route est-ouest, toujours proche de la frontière et suivant plus ou moins les lignes de la Lauter avec ses redoutes aujourd’hui disparues, je suis donc rentrée dans les forêts du parc naturel régional des Vosges du Nord. Je suis immédiatement frappée par leur beauté. Ces forêts sont somptueuses. Hêtraies, chênaies, pinèdes, sapinières … Dans la matinée je traverse le village de Climbach puis celui de Petit Wingen que je trouve bien endormis. Ce qui me frappe dans les forêts de hêtres c’est cette impression d’immensité et de puissance… Je suis toujours le chemin de Grande randonnée, le GR 53 qui s’identifie ici au « chemin des châteaux forts d’Alsace ».
Car plus de 400 châteaux-forts ont été construits dans le massif des Vosges entre le 10ème et le 14ème siècle. Ma route est jalonnée de ruines souvent perchées sur des rochers en grès rose que l’on atteint par des escaliers raides parfois creusés dans la roche. Je grimpe successivement sur les châteaux de Loewenstein, Hohenbourg, Fleckenstein, Froensbourg, le Rocher des tziganes, Wasigenstein. Ce sont des lieux à la fois de défense, de pouvoir, de résidence qui se développent quand le Saint-Empire romain germanique s’affaiblit. Sous l’autorité du seigneur, ces châteaux protègent le territoire et ses habitants. Progressivement au cours du 14ème siècle ils sont abandonnés en raison de leur coût, de leur inconfort ou des guerres.
Après ce long trajet plein de surprises, je redescends dans la vallée pour atteindre Obersteinbach, un village frontière entre l’Allemagne d’une part et la Lorraine d’autre part construit tout en longueur le long d’une ancienne voie militaire stratégique qui permettait les échanges mais aussi le trafic de contrebande. J’atteins enfin mon hébergement, l’hôtel Alsace-Village, un « hôtel au naturel », au cœur du parc naturel régional où la propriétaire me réserve le plus chaleureux des accueils. Un couple de jeunes lorrains, très sportifs, m’invitent à leur table. Nous dévorons un copieux et succulent repas préparé avec les produits de la ferme biologique toute proche. Je m’endors face à une photographie d’une passerelle népalaise…