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La Tour-sur-Orb – Combes
5 juin 2020
Voici une vidéo retraçant la 71 ème étape d’un cheminement à travers la France, de la frontière allemande au nord de Strasbourg à, ( peut-être un jour!), la frontière espagnole au sud de Perpignan. Dans cette longue marche, mon attention se porte en premier lieu sur les paysages, leur protection et leur reconquête éventuelle ainsi que sur la biodiversité et sa reconquête.
Dans cette étape, je m’écarte de la vallée de l’Orb avant de la retrouver à Lamalou-les-Bains. Je passe le village médiéval de Boussagues où Toulouse-Lautrec possédait la maison du Bailli, un hôtel particulier Renaissance, traverse le Pont du diable qui enjambe la Mare, grimpe sur la Montagne de Capimont avec sa chapelle Sainte-Anne, descends sur Lamalou-les-Bains puis remonte jusqu’à Combes, une commune du PNR du Haut-Languedoc, sur les flancs de la Montagne de l’Espinouse.
Voici le texte de cette vidéo:
Nous avons donc passé la nuit sur l’aire du Bousquet d’Orb. Que retenir de ce lieu sinon qu’en décembre 1986, l’équipe bousquetaine de rugby à XV est entrée dans l’histoire en perdant 0 à 240 face à celle de Puisserguier ?! Plus sérieusement, le Bousquet d’Orb, comme la Tour-sur-Orb d’où je repars accompagnée de Daniel sont situés dans l’Hérault, en bordure est du Parc naturel régional du Haut-Languedoc.
Le GR 7 suit sur deux kilomètres une petite départementale qui s’élève jusqu’au bourg médiéval fortifié de Boussagues, petit hameau blotti au pied du mont Coudour, serrant ses hautes maisons autour de son église romane et de ses châteaux.
Passages voûtés, fenêtres étroites, remparts et poterne rappellent qu’à son apogée au 14ème siècle, c’était la plus importante baronnie de la haute vallée de l’Orb avec ses consuls, son gouverneur, ses seigneurs, ses baillis qui rendent la justice et administrent les biens. Les exploitations des minerais d’argent puis de charbon assuraient alors son rayonnement.
Voici justement la Maison du bailli, un hôtel particulier, Renaissance, dont la tour ronde est surmontée d’un pigeonnier. Plus tard elle est transformée en école de jeunes filles tenue par des religieuses dont Amandine de Sénégra qui la lègue à son neveu Toulouse-Lautrec lequel écrivait – j’imagine bien le peintre un verre d’absinthe posé sur son bureau – : « Je peux bien m’amuser et tout me permettre puisque maman entretient dans notre vieille tour de Boussagues des nonnes dont la principale fonction est de prier pour le salut de mon âme et qui montent et descendent dans leur donjon comme grenouilles dans un bocal.»
En quittant le village je passe devant les restes de l’abside d’une autre église de style gothique méridional avant de m’éloigner sur le plateau entre oliviers, vignobles et genêts. A la croix de Clairac la route fait face au Mont Coudour et paresse en descendant vers la vallée de la Mare. Un sentier en balcon tout à fait charmant domine bientôt la rivière et le village de Clairac et se faufile entre vignes et champs de cerisiers. Il débouche au Pont du diable qui enjambe la Mare, un pont en pierre du 13ème siècle, classé Monument Historique qui servait à l’acheminement de la houille pour la verrerie royale d’Hérépian.
Le soleil se montre enfin, la remontée sur la rive d’en face jusqu’au village du Pradal par la route goudronnée permet de belles vue sur la vallée.
Peu après le hameau de la Sesquière je contourne par l’est la Montagne de Capimont pour rejoindre un lieu, sacré dès la période celte, puis occupé par les Romains, avant l’arrivée des chrétiens qui construisent au 12 ème siècle l’église de Notre Dame de Capimont et la chapelle Sainte-Anne. Un ermitage vint s’établir là plus tard, au 17ème siècle. A mes pieds s’étale la vallée de l’Orb que je retrouve, coulant d’est vers l’ouest avec, à gauche, la ville d’Hérépian.
L’eau est une source de richesse pour ce pays, eaux minérales, eaux thermales, eau indispensable à l’agriculture. Vignes, cerisiers et jardins potagers bordent la rivière. Jadis les moulins faisaient tourner les meules qui broyaient les céréales en farine mais la forêt a recouvert les pentes, ici comme souvent ailleurs en France, effaçant les anciennes cultures en terrasses. Il n’y a plus de coupes de bois pratiquées autrefois par les verriers, les charbonniers ou les bûcherons.
Aux abords de l’Orb, là où l’eau est abondante poussent les frênes, les peupliers et les saules. Sur les sols pauvres et secs des versants chauds pousse le chêne vert alors que le chêne blanc préfère les lieux plus frais et plus humides.
Quand je tourne mon regard vers l’ouest, la vallée qui vient du nord est celle du Bitoulet, un affluent de l’Orb, où s’est installée la ville thermale de Lamalou-les-Bains.
En arrière, face de moi, s’élèvent les Monts du Caroux et de l’Espinouse que je foulerai longuement demain mais que je vais commencer à gravir dès cet après-midi.
Pour l’instant je quitte ce roc et m’enfonce à nouveau dans cette forêt de chênes. Le GR dégringole jusqu’aux faubourgs de Lamalou-les-Bains. Le filet d’eau que j’enjambe est le Bitoulet, sans aucun doute capable de sérieuses crues lors d’épisodes méditerranéens.
Je retrouve Daniel près de la halle aux fruits et légumes. Il est temps d’aviser un restaurant : nous y déjeunons en terrasse, le long de l’avenue Charcot puis je repars, passant devant les établissements dédiés au thermalisme et à la rééducation fonctionnelle. La piste est plaisante qui monte dans une forêt de pins et se poursuit par une étroite sente empierrée à travers les châtaigniers jusqu’à la croix des Baussels.
L’ambiance change alors brutalement : le chemin taillé au milieu d’anciennes terrasses envahies de chênes et de sapins est bordé par de hauts murets de lauzes qui parfois se délitent, pourtant fruit du labeur acharné de nombre de générations.
J’arrive ainsi à Torteillan, un hameau insolite au milieu de nulle part, habité et bien entretenu situé sur le chemin de la Carral et de la Capoulade, deux minuscules hameaux eux-aussi perdus dans la forêt profonde. Je descends au fond du ravin de la Capoulade puis remonte en face, visant le clocher d’une église qui émerge, au loin, de la verdure. C’est que j’arrive à Combes, but de ma journée, una comuna del pargue natural, regional del Lengadoc-Naut, situé à 500m d’altitude, à flanc des contreforts de l’Espinouse.
J’y retrouve Daniel qui, venant de Lamalou-les-Bains s’est sorti brillamment du dédale des petites routes de montagne. Nous nous installons un peu plus haut sur un terre-plein proche du col des Princes, près du centre de rééducation fonctionnelle de Saint-Vital.