RAMIERES DU ROUBION

Written by Claude CAMILLI

Protégeons-les !

31 juillet 2021

Par Mallaury Grosjean & Clara Rouillard

Sommaire

  1. Présentation
  2. Le Roubion et son bassin versant
  3. Les ramières du Roubion : description, rôle et classement
  4. Le Roubion au fil des saisons
  5. Un problème lourd de conséquences
  6. Problématique
  7. Arrêté Préfectoral de Protection des Habitats Naturels
  8. Syndicat Mixte du Bassin du Roubion et du Jabron
  9. Nos animations
  10. Nos inventaires
    1. IKA-Saint-Gervais-sur-Roubion
    2. IKA-La Laupie
    3. IPA-Sauzet
    4. IPA-Pont-de-Barret
    5. Inventaires aléatoires
  11. Acteurs
    1. Ecosociosystème
    2. Rencontres et remerciements
  12. Que faut-il faire ?
  13. Liste des figures :
    1. Figure 1 : Cartographie IKA Saint – Gervais – sur – Roubion
    2. Figure 2 : Cartographie IKA La Laupie
    3. Figure 3 : Cartographie IPA Sauzet
    4. Figure 4 : Cartographie IPA Pont – de – Barret
  14. Liste des tableaux :
    1. Tableau 1 : Résultat IKA Saint – Gervais – sur – Roubion
    2. Tableau 2 : Résultat IKA La Laupie
    3. Tableau 3 : Résultat IPA Sauzet
    4. Tableau 4 : Résultat IPA Pont – de – Barret
    5. Tableau 5 : Résultat des inventaires aléatoires
Clara et Mallaury

1.   Présentation

Étudiantes en BTS Gestion et Protection de la Nature, nous devons réaliser un stage pour le passage en 2è année. Nous avons eu la chance d’effectuer celui-ci dans l’association Paysages Reconquis, fondée par Claude Camilli, pour une durée de 12 semaines, de mai à juillet 2021.

Sensibilisée par son ami, Etienne Crémille, au sujet des coupes rases qui ont eu lieu en 2018 dans les ripisylves du Roubion, Claude a trouvé opportun de nous proposer de réaliser une étude autour de ce combat environnemental.

A travers cette étude nous nous sommes demandé pourquoi la centrale de biomasse basée à Pierrelatte fait subir aux ramières du Roubion un tel désastre écologique et quel est son but.
Nous avons réalisé divers protocoles d’inventaires faunistiques et floristiques afin de mettre en avant la richesse de la biodiversité de ces ramières et l’importance que constituent les ripisylves.

Nous nous sommes intéressées à l’Arrêté Préfectoral de Protection des Habitats Naturels, signé en avril 2021, ayant pour objectif la gestion et la protection des ramières.

Ayant été informées du contrat de rivière établi par le Syndicat Mixte du Bassin du Roubion et du Jabron, nous avons essayé de comprendre quel est le rôle de celui-ci et en quoi consiste le contrat de rivière.

Enfin, au cours du mois de juin, nous avons réalisé une animation auprès des enfants de deux classes de maternelle pour les sensibiliser à la protection de leur environnement.

2.   Le Roubion et son bassin versant

Cette rivière au régime hydraulique pluvial, s’étend sur 67km traversant le département ainsi que 21 communes.

Le Roubion est une rivière dynamique dont le bassin versant est de 610 km2. Il est alimenté par ses nappes phréatiques ainsi que par ses affluents. Le Vèbre est son affluent principal, le Jabron qui mesure 38,8 km est le plus long. L’Ancelle, un autre de ses affluents, situé à La Laupie, ne s’assèche jamais durant les périodes de chaleur, ce qui permet à une partie du Roubion de rester en eau. Le Roubion prend sa source au-dessus du village de Bouvières puis traverse le pays de Bourdeaux. Aujourd’hui, il se jette à Montélimar dans le canal de dérivation qui se trouve à 72 mètres d’altitude, tandis que son ancien lit poursuit vers le Rhône.


Confluence Roubion/Ancelle

3.   Les ramières du Roubion : classement, description et rôle

Qu’est-ce qu’une ramière ? Ramière, plus communément appelée ripisylve, est un terme provençal pour définir les forêts qui bordent les prés, les rivières, les fleuves …

A l’ouest de la Drôme provençale dans un climat méditerranéen se trouve le Roubion classé Natura 2000 (réseau européen qui regroupe des sites naturels d’une importance patrimoniale) ; c’est un Espace Boisé Classé (EBC) et il comporte également deux ZNIEFF (Zone Naturelle d’Intérêt Ecologique Faunistique et Floristique) de type 1 et de type 2.

Les ripisylves du Roubion présentent plusieurs habitats. Sur le rivage, nous trouvons un lit de graviers blancs (1) couvert de Spartiers à tige de jonc, de Carottes sauvages, de Cabarets des oiseaux, ainsi que d’autres plantes recouvrant les berges (2). En s’enfonçant dans la ripisylve, différentes formations végétales y sont présentes. Sur certaines rives comme à La Laupie et à Saint-Gervais-sur-Roubion, la forêt est composée essentiellement de Frênes et d’Aulnes (3). D’autres sont habillées de Peupliers noirs et blancs ainsi que de Saules blancs et Saules pourpres (4). Quelques prairies d’Orchidées sont également présentes autour du Roubion.

Code corine biotopes* :

  • (1) code CORINE biotopes : 24.255. Lits de graviers méditerranéens
  • (2) code CORINE biotopes : 24.224. Fourrés et bois des bancs de graviers
  • (3) code CORINE biotopes : 44.3. Forêt de Frêne et d’Aulnes des fleuves médio-européens
  • (4) code CORINE biotopes : 44.1. Formations riveraines de Saules

* Le catalogue Corine Biotopes est, en écologie, un référentiel hiérarchisé européen qui propose une classification des habitats naturels et semi-naturels présents sur le sol européen.


Panneau présentant la prairie d’orchidées

Cette ripisylve joue un rôle très important dans le maintien de la biodiversité. Les racines des arbres nettoient le sol des intrants agricoles et garantissent ainsi la qualité de l’eau. Elles maintiennent également les berges lors des crues ce qui prévient les effondrements et les rétrécissements de la forêt alluviale.


Effondrement de berge

La rivière du Roubion est composée de deux parties. De Chaudebonne à Pont-de-Barret pour la partie amont qui est plus rustique et moins soumise à la pression de l’homme et sa partie aval qui s’étend de Pont-de-Barret jusqu’à Montélimar. Cette partie qui constitue notre zone d’étude est fortement dessinée par un paysage agricole. En 2018 on comptait 87,6% de terre agricole pour Saint-Grevais-sur-Roubion, 72,9% à Sauzet, 36% à Pont-de-Barret et 44,2% à Montélimar. L’agriculture, l’industrie et l’alimentation en eau potable exercent une lourde pression sur les eaux du bassin versant. Entre 2003 et 2008 ce sont 5 700 000 m3 d’eau en moyenne qui sont exploités.

Des activités de loisir font également partie de l’anthropisation que nous pouvons constater autour du Roubion, telles que la pêche, les baignades, les randonnées et le camping de Pont-de-Barret.


Agriculture  dans la plaine du Roubion / Photo prise à La Laupie

4.   Le Roubion au fil des saisons

Au cours des siècles, ce sont au total 86 crues significatives qui ont façonné le décor que l’on connait aujourd’hui. Ces crues sont le résultat d’une chenalisation du cours d’eau afin de répondre aux besoins des hommes pour les exploitations agricoles et approvisionner les habitants en eau. Les conséquences sont désastreuses, ponts et habitations détruites, terres agricoles submergées…

A notre arrivée en mai, le Roubion était en crue à la suite de pluies importantes. Au fil des mois la chaleur a fait son apparition ce qui a entraîné, comme lors de toutes saisons estivales, un assèchement d’une partie de la rivière, l’eau ne s’écoulant plus que dans la nappe phréatique.


Mai 2021 – A notre arrivée, le Roubion était en crue.
Saint-Gervais-sur-Roubion

Juin 2021 – Au cours du mois, le Roubion commence à s’assécher

Juillet 2021 – Après plusieurs jours de beau temps et de chaleur, le Roubion n’est plus qu’un banc de graviers.

5.   Un problème lourd de conséquences

Depuis l’implantation, en octobre 2012, de l’usine de biomasse à Pierrelatte des coupes rases ont été constatées. Ce sont plusieurs hectares de forêts alluviales qui ont disparu sous les lames des machines destructrices de biodiversité.

Plusieurs sites Natura 2000 et réserves naturelles ont été exploités pour leurs bois sous la pression des objectifs prévus par la centrale de Pierrelatte. Des espèces les plus représentées aux espèces les plus discrètes et vulnérables qu’elles soient floristiques ou faunistiques, toutes se voient expulsées de leur habitat.

Selon le quotidien de l’écologie Reporterre, les 55 millions d’euros investis pour l’ouverture de l’usine de cogénération biomasse ont été la réponse apportée par Areva afin de compenser la fermeture de l’usine d’enrichissement de l’uranium Georges-Besse I. Leur promesse : produire une énergie se voulant plus propre dans le but de se rapprocher des positions du Grenelle de l’environnement.Cependant, c’était sans compter les conséquences faites sur les habitats forestiers. En effet, dès la première année ce sont 20 000 tonnes de bois amputées aux forêts du département, ce qui n’est rien comparé aux 150 000 que Coriance, l’organisme gestionnaire, avait prévues.

C’est un projet surdimensionné qui ne répond pas non plus à certains enjeux sociaux.

6.   Problématique 

centrale biomasse de Pierrelatte

Les ripisylves constituent un réservoir biologique et un corridor écologique pour plusieurs espèces. Rappelons qu’un corridor écologique est une zone de passage fonctionnelle entre plusieurs espaces naturels pour un groupe d’espèces inféodées à un même milieu. 1

Les forêts alluviales représentent 1.6 % du territoire drômois, elles sont indispensables à l’existence de certaines espèces. Poissons, batraciens et insectes y déposent leurs œufs, nichent dans les racines immergées et mangent les fruits qui y tombent.

C’est pourquoi nous devons protéger les ripisylves ! En plus d’être un réel eldorado pour la faune sauvage aquatique et terrestre, elles jouent un rôle important pour le bon fonctionnement du biotope ! Les ramières présentent donc un grand intérêt écologique !

Par ailleurs, les arbres procurent aux espèces aquatiques de la fraîcheur qui permet de mieux répondre à leurs besoins de reproduction et d’alimentation.

De plus, lors des pluies, l’eau ruisselle jusque dans les rivières, et sans les racines des arbres le Roubion serait davantage pollué par les intrants utilisés en agriculture ce qui engendrerait une perte de la biodiversité aquatique.

Enfin, la ripisylve est une zone d’expansion des crues et joue donc un rôle de tampon entre les zones urbanisées et le cours d’eau. Elle permet non seulement d’éviter une saturation en eau des sols mais également une augmentation du niveau des crues. Sans les ramières, le risque serait l’inondation des terres agricoles et la destruction des zones anthropisées. Les racines des arbres retiennent également les embâcles transportés par les crues.

Aujourd’hui, il est plus que temps de faire bouger les mentalités. A notre échelle, apprenons à vivre en respectant ce qui était là avant nous et à collaborer avec la nature !! Notre Terre s’essouffle !!

A l’heure de la préservation de la nature, de la conservation des habitats, à l’heure du Congrès mondial de la nature de l’UICN, l’Union internationale pour la conservation de la nature, qui s’est tenu à Marseille en septembre 2021, il ne doit plus exister des aberrations telles que ces invraisemblables coupes rases !  

Alors comment protéger les ramières ? Avec quels outils ? Quels contrôles envisager ? Comment s’assurer que ces contrôles seront effectifs ? Que mettre en place pour mesurer le gain de biodiversité ? Pourra-t-on un jour parler de reconquête des ramières ?

7.   Arrêté Préfectoral de Protection des Habitats Naturels

Les arrêtés préfectoraux de protection des habitats naturels (APPHN) visent à protéger spécifiquement des habitats naturels en tant que tels, indépendamment de la présence d’espèces protégées via des mesures réglementaires 2.

Après un combat de plusieurs années et de nombreuses mobilisations, concertations, consultations, ajustements, délimitation du périmètre et écritures, les ramières ont obtenu gain de cause et l’APPHN est signé le 26 avril 2021. Notons que c’est le 1e APPHN de France protégeant une ripisylve. Cet arrêté a été à l’initiative de plusieurs organismes, la Ligue de Protection des Oiseaux (LPO), la Direction Départementale des Territoires (DDT), le Syndicat Mixte du Bassin du Roubion et du Jabron (SMBRJ), le Conservatoire d’Espaces Naturels (CEN), des collectifs de la protection des ramières, des associations de protection de la nature… Touchée par ce fléau qui s’abat sur les forêts du Roubion, la DDT propose l’application d’un Arrêté Préfectoral de Protection des Habitats Naturels (APPHN) puisque les outils déjà mis en place ne suffisaient pas à protéger les forêts alluviales et garantir le maintien de leur richesse faunistique.

Cet APPHN reconnait les pressions que subissent ces ramières et a pour but de réglementer les activités humaines et commerciales afin de préserver le caractère sauvage de ces espaces. Il s’agit donc de conserver, voire de reconquérir la biodiversité au sein des ramières.

L’APPHN est un dispositif récent de protection des habitats naturels, en application depuis décembre 2018. Il complète un autre dispositif déjà existant, l’arrêté préfectoral de protection de biotope (APPB), qui ne peut s’appliquer qu’à des habitats naturels abritant des espèces protégées et menacées. Grâce à l’APPHN, il est désormais possible de protéger des habitats qui ne sont pas nécessairement occupés par des espèces animales ou végétales protégées. La liste de ces habitats est dressée par un arrêté du 19 décembre 2018. 

Dans l’article n°2 alinéa 2.2 de l’arrêté, il est mentionné que dorénavant l’abattage d’arbres devra respecter trois critères. Il sera réalisé de façon homogène, le taux de prélèvement devra représenter 30% maximum du volume sur pied et aucune coupe ne devra être réalisée pendant les huit années qui suivront.

A la suite de la signature de cet arrêté, les propriétaires ont été informés des nouvelles directives. Il est maintenant interdit d’accepter que les forestiers viennent couper la ripisylve. Il est également défendu d’y installer de la populiculture – culture du peuplier – à des fins commerciales.

C’est l’Office Français de la Biodiversité (OFB) qui sera chargé de faire respecter cet APPHN et qui se voit attribuer la lourde tâche de sanctionner dans le cas contraire.

En effet l’OFB a plusieurs missions : Connaissance et expertise, appui aux politiques publiques, gestion et restauration des espaces protégés, mobilisation de la société, police de l’environnement. C’est dans le cadre de cette dernière qu’il se voit attribuer ce rôle de surveillance. Grâce aux expertises de ses 1700 agents, il peut ainsi évaluer l’impact sur la biodiversité des mesures de protection ou des différents aménagements. Un comité de suivi se tiendra dans un an pour un premier bilan et mettra ainsi en avant l’efficacité de cet arrêté ou, dans le cas contraire, devra pointer les éventuelles failles et indiquer comment y remédier.

8.   Syndicat Mixte du Bassin du Roubion et du Jabron

Le syndicat mixte créé en 2001, par la fusion des deux syndicats, exerce ses compétences sur le bassin versant du Roubion, du Jabron, de la Riaille, et de quelques petits affluents directs du Rhône. Il a fait partie des sonneurs d’alarme en alertant la DDT sur les coupes rases constatées.

Si par le passé, le rôle de ces syndicats était exclusivement de réparer les dommages créés par les crues, aujourd’hui les missions de ce syndicat mixte sont bien différentes. Il a la charge de l’entretien de la végétation, de l’animation du site Natura 2000 ainsi que de la gestion et de la préservation des berges et du lit du Roubion.

Le SMBRJ joue donc un rôle dans la gestion et la préservation des ripisylves notamment dans le but de limiter le risque d’inondation, par exemple en restaurant et entretenant la végétation dans les villes et les villages pour éviter la saturation des sols en eau lors de crues, ainsi qu’en aménageant un chemin d’exploitation communal grâce à la technique du fascinage. (Le fascinage est une structure composée de branchages de manière à former un barrage).

Après la signature du premier contrat de rivière en 2018, ayant pour but l’amélioration de la qualité de l’eau et des milieux aquatiques de manière durable, des passes à poisson ont été installées notamment à Pont-de-Barret et à Sauzet pour faciliter le déplacement de la faune aquatique à la montaison.

Les berges du Roubion sont importantes pour la gestion des crues, elles permettent à la rivière de déborder lors de crues annuelles. Un milieu naturel sans entretien court vers la fermeture de ses habitats. Il est donc important de gérer les milieux en maintenant les espaces naturels propices au développement de certaines espèces. La densification de la végétation détruirait les habitats remarquables de ce site classé Natura 2000 et protégé par un APPHN. Cela entrainerait la perte d’une faune menacée et rare.

L’éradication des espèces exotiques envahissantes (EEE) présente également un enjeu important pour la conservation des espaces naturels. En effet, leur prolifération nuit au développement des espèces indigènes et entraîne une uniformisation des habitats. De fait, en cas de prolifération, beaucoup d‘espèces végétales disparaissent et par effet domino, la faune disparait également. Pour prévenir ces risques, le SMBRJ a conclu un contrat avec un éleveur de chèvres et de moutons qui fait paître ses bêtes dans le lit du Roubion de juin à juillet. Ceci afin de maintenir les milieux ouverts et de lutter contre les espèces exotiques envahissantes comme l’ambroisie, le robinier faux acacia ou encore la canne de Provence.

L’homme, par le passé, a modifié la forme du cours d’eau en le chenalisant afin de répondre à ses besoins. Cette modification a des conséquences dramatiques sur le Roubion et sa faune. Sa chenalisation entraîne un enfoncement du lit et la disparition des trous d’eau riches en faune aquatique. Par ailleurs, la puissance de l’eau détruit la flore aquatique. Cette modification augmente l’impact des crues sur la flore et la faune terrestre et aquatique puisque les méandres chargés d’élargir le lit majeur sont inexistants. Ces crues de plus en plus importantes creusent les berges et par conséquent les racines des arbres ne sont plus connectées à la nappe phréatique puisque celle-ci aussi disparait avec l’enfoncement du lit. Dans le cadre du contrat de rivière, le SMBRJ met en place un projet de restauration hydromorphologique. Il s’agit du reméandrage du Roubion entre Manas et Charols. Ce projet redonnera au Roubion un aspect plus naturel, proche de celui de 1946. Il retrouvera donc ses méandres d’autrefois et la biodiversité perdue. Ce projet permettra de reconnecter les berges et la végétation à la nappe phréatique, de ralentir le débit du cours d’eau et de diminuer les dégâts causés par les crues. Cet aménagement permettra également de retrouver les espèces indigènes perdues comme les peupliers, les saules, les espèces aquatiques, l’avifaune …

9.   Nos animations

Durant le mois de juin, l’école de Saint-Gervais-sur-Roubion nous a ouvert ses portes pour nous permettre d’aller à la rencontre des deux classes de maternelles. Au cours de ces quatre semaines, nous avons préparé et animé des activités pour sensibiliser les enfants à l’importance de protéger la forêt et les animaux qui y vivent.

Participer à l’éveil et la sensibilisation d’un jeune public a été extrêmement enrichissant tant du point de vue éducatif qu’émotionnel.

Ces enfants nous ont confrontées à la difficulté qui consiste à adapter son discours et son vocabulaire pour se faire comprendre le mieux possible et transmettre le message souhaité.

Les enfants forment un public exigeant car ils sont en demande d’attention constante. Il est donc nécessaire d’avoir bien préparé son animation pour gérer au mieux le temps et principalement celui entre deux activités.

Émotionnellement il n’est pas de plus grand bonheur que de voir évoluer ces enfants autour d’un thème choisi et de constater qu’ils se l’approprient.

Ex : L’un des messages que nous voulions qu’ils assimilent était le suivant : il ne faut pas détruire la nature. Donc nous leur demandions de ne pas arracher les fleurs entre le chemin de l’école et le site de l’animation.

À la fin du mois une petite fille de 4 ans nous disait en chemin, un peu perdue dans ses pensées, qu’il ne faut pas arracher la maison des insectes. (Les maisons des insectes étant bien sûr les fleurs).

Histoire d’Oscar le renard

À travers un jeu d’images ils ont pu trier les animaux qui vivent dans la forêt près de chez eux.

Ils ont appris qu’on pouvait reconnaitre quel animal est présent en reconnaissant une empreinte.

Nous avons laissé les enfants donner libre cours à leur imagination et créativité pour la construction de barrages de castor.

Ils ont également fait la liste des aliments que mange le renard ainsi que le loriot.

Il n’existe pas de plus grande satisfaction que celle de discuter avec une mère qui nous explique que son garçon, d’ordinaire peu loquace sur ses journées d’école, lui raconte ce qu’il a fait et appris sur les animaux de la forêt.

Cette expérience, qui a été des plus enrichissante, prend tout son sens quand un parent d’élève vient nous dire que son fils, qui habituellement ne parle pas trop de ses journées à l’école, a raconté ce qu’il a fait pendant les animations. Nous sommes touchées et satisfaite de notre travail lorsque les enfants s’empêche d’arracher les fleurs, habitat des insectes.

1O. Nos inventaires

Dans le cadre d’une étude de terrain il est indispensable de procéder à des inventaires floristiques et faunistiques. Ces inventaires permettent de chiffrer la diversité (nombre d’espèces différentes sur un site) et la richesse spécifique des espèces présentes sur la zone d’étude (nombre d’individus par espèce sur un site).

IKA : L’indice kilométrique d’abondance est un protocole d’inventaire permettant de mesurer l’abondance d’une ou plusieurs espèces observées sur une distance choisie dans un milieu homogène. Cette technique a été créée par Ferry et Frochot en 1958.

IPA : Indice Ponctuel d’Abondance (IPA) est une méthode élaborée et décrite par Blondel, Ferry et Frochot en 1970. Ce protocole consiste à noter l’ensemble des oiseaux observés et/ou entendus durant 10 minutes à partir d’un point fixe. Chaque point d’écoute est choisi de façon à couvrir l’ensemble de l’aire d’étude et des habitats naturels présents. Tous les contacts auditifs ou visuels avec les oiseaux sont notés sans limitation de distance.

Inventaire aléatoire : Dans chaque zone définie, un relevé faunistique et floristique est effectué sur un trajet non anticipé. Cet inventaire est utilisé lorsque la zone d’étude est homogène et permet de mettre en avant les espèces représentatives du milieu

10.1.    IKA-Saint-Gervais-sur-Roubion

10.2.    IKA-La Laupie

10.3.    IPA-Sauzet

10.4.    IPA-Pont-de-Barret

10.5. Inventaires aléatoires

Zones d’inventaire : La Laupie, Sauzet 1, Sauzet 2, Pont-de-Barret, Saint-Gervais-sur-Roubion

Code UICN renseignant les statuts de conservation des espèces.

Avec nos protocoles d’inventaires, nous avons pu observer différentes espèces animales et végétales.

L’Ancelle, un affluant du Roubion, héberge une espèce de libellule, l’Agrillon de mercure, qui est protégée par l’arrêté du 23 Avril 2007 et son statut de conservation est quasi menacé en Europe (NT).  

Lors de nos points d’écoutes et nos IKA nous avons aperçu et entendu le timide roucoulement de la tourterelle des bois qui est une espèce vulnérable en France (VU).

Des castors trouvent refuge à la Laupie où nous avons pu en observer deux à la tombée du jour. Cet animal est depuis longtemps protégé mais non menacé.    

Au travers de nos inventaires IPA et IKA réalisés le matin, nous pouvons remarquer que les activités humaines jouent un rôle important dans la diversité des espèces.

En pleine saison, Pont-de-Barret accueille des touristes, la faune est perturbée par la cohue des nouveaux arrivants durant les mois d’été.  Par ailleurs, des espèces floristiques non indigènes ont été plantées dans le camping pour des raisons esthétiques. Cet aménagement a pour conséquence d’empiéter sur les espaces disponibles pour les autres espèces représentatives du milieu.

Plus nous nous rapprochons de Montélimar, plus la diversité faunistique et floristique est faible. Tandis que sur les berges du Roubion aux alentours de Sauzet et Saint-Gervais-Sur-Roubion, nous avons pu observer une plus grande diversité. Par exemple nous avons vu une colonie de Guêpiers d’Europe volant entre les rares peupliers restant après le passage des machines. Nous avons également observé des hérons cendrés, des aigrettes garzettes, des milans noirs et des loriots d’Europe. Nous avons même été surprises par un renard traversant le bois.

11. Acteurs

11.1. Écosociosystème

LPO : Ligue de Protection des Oiseaux

DDT : Direction Départementale des Territoires

ONF : Office National des Forêts

FNE : France Nature Environnement

APEG : Association de protection de l’Environnement du Pays de Grignan et de l’Enclave des Papes

11.2.    Rencontres et remerciements

Réaliser ce stage nous a donné l’opportunité de rencontrer différents acteurs qui ont un lien de près ou de loin avec la rivière du Roubion.

Merci à Damien Chantreau, qui a été le premier à nous accorder du temps pour répondre à nos questions. Grâce à lui, nous avons pu dissiper le flou qui persistait autour de certaines notions et des rôles de chacun dans la protection du Roubion. Il nous a expliqué le rôle du Syndicat et ses engagements concernant la gestion et la protection du Roubion ainsi que sa participation à la mise en place de l’APPHN.  

Nous remercions Christine Coulon, une botaniste amateure et passionnée, qui nous a apporté beaucoup d’aide en ce qui concerne l’inventaire floristique que nous avons effectué. Elle nous a également prouvé, par sa détermination et ses actions menées dans la commune de Montélimar, qu’il existe encore aujourd’hui des personnes investies et motivées à faire bouger les mentalités sur les lois environnementales. Elle a été à l’origine d’une écozone afin de recréer une ripisylve sur les berges du Roubion dans sa traversée de Montélimar. Son but est d’enrayer la perte de biodiversité en favorisant le retour d’une flore et d’une faune plus diversifiée.

Nous tenons à remercier Jean-Michel Faton (odonatologue-spécialiste des libellules), sans qui aucune de nos cartographies n’aurait pu être aussi bien aboutie. Il nous a formées au logiciel QGIS ce qui nous a permis d’apporter de la technicité à nos inventaires. Nous avons eu la chance de l’accompagner sur le secteur de La Laupie afin de réaliser un inventaire d’odonates et c’est avec beaucoup de plaisir que nous l’avons vu capturer et manipuler l’Agrillon de mercure, cet insecte au bleu éclatant. Attention ! La capture d’odonates ne peut se réaliser qu’avec autorisation préfectorale.

L’histoire du Roubion a été marquée par ses crues et c’est Philippe Thoumas qui en parle le mieux. Après 2 heures passées avec lui, nous avons pris la mesure de la puissance de cette rivière ce qui nous a amené à comprendre les aménagements construits pour protéger les habitants, les habitations, les routes et les ponts. Nous le remercions du temps qu’il nous a accordé.

C’est avec plaisir que nous avons rencontré Thierry Insalaco, du pôle « espaces naturels », dans les bureaux de la DDT à Valence. Grâce à lui, nous avons compris le déroulement et le parcours qui a précédé la signature de l’APPHN. Il nous a notamment expliqué comment certains propriétaires terriens ont vu leur propriété se faire dévaster par le travail peu scrupuleux de certains forestiers. En échange d’une somme d’argent plus élevée que le prix du marché pour l’achat de leur bois, ces forestiers proposent de nettoyer leurs parcelles. Malheureusement ce nettoyage équivaut à une coupe à blanc.

Merci à Noël Sagnel, agriculteur à la retraite et propriétaire de terres au bord du Roubion, à Anne-Claire Vial, agricultrice, propriétaire et conseillère municipale à la mairie de Saint-Gervais-sur-Roubion. Mais également à Valérie Méo et Denis Arnaud, producteurs de fruits et de légumes bio ainsi que de plantes médicinales. Tous deux possèdent des chevaux de trait qui leur permettent de travailler la terre.

Tous sont sensibilisés aux menaces auxquelles fait face le Roubion. Cependant, ils n’ont pas tous le même avis sur la question.

Nous avons eu la chance de croiser à plusieurs reprises Julien accompagné de son troupeau de chèvres et de brebis. À travers un contrat Natura 2000 passé avec le SMBRJ, il sillonne le lit du Roubion de Sauzet à Bonlieu-sur-Roubion afin d’empêcher la fermeture du milieu et de lutter contre la propagation de l’ambroisie.

 Trois heures durant à Sauzet nous avons arraché de l’ambroisie avec Jean-Pierre Sauvadon, ancien agriculteur et élu à la mairie de Sauzet.

Fondateur de l’association Stop Ambroisie, il mène un combat contre cette espèce envahissante. Pour ce défenseur des ramières, la combinaison de plusieurs techniques (arrachage manuel, pâturage et débroussaillage) peut venir à bout de cette plante allergisante.  

Fanny Achard, une jeune agricultrice bio, également élue de la mairie de Sauzet, a été effondrée le jour où elle a vu, depuis sa fenêtre, les arbres tomber les uns après les autres tels du blé pendant la moisson.

C’est avec beaucoup d’émotion qu’elle nous a expliqué ne plus reconnaitre les lieux où elle a grandi, nous montrant les cicatrices encore visibles du passage des machines.

12. Que faut-il faire ?

Des passionnés, des professionnels, des curieux et des amateurs ont tous été sensibilisés par les coupes rases qu’ont subies les ramières du Roubion.

Après plusieurs années de mobilisation et de discussions, c’est avec beaucoup de joie que les habitants et les protecteurs des ramières sont informés de la signature de l’APPHN le 23 avril 2021. Cet arrêté, en partie, limite les coupes de bois et règlemente l’utilisation et l’exploitation des ripisylves. Nous espérons que la mise en place d’un APPHN sur ces ramières permettra aux élus et aux utilisateurs de ces ripisylves (pêcheurs, chasseurs, promeneurs…) de prendre conscience de l’importance de protéger ces habitats. Aujourd’hui, nous n’avons pas assez de recul pour constater des changements de mentalités et d’habitudes liées à la protection des ramières. Il est inconcevable d’abuser des autorisations de coupes de bois. Il est toléré, comme stipulé dans l’arrêté préfectoral, de couper une certaine quantité d’arbres tout en respectant les espèces autour. Nous n’aimerions pas que des personnes viennent détruire nos habitations en nous chassant sans autorisation et sans respect, alors il en va de même pour les autres êtres vivants. Les oiseaux ont besoin d’arbres morts pour y chasser les insectes, les vertébrés ont besoin d’abris pour se cacher des prédateurs ou pour construire leurs nids, huttes, terriers… Si les bûcheronsarrachent les arbres c’est tout un équilibre  qui est détruit.  

Aujourd’hui, gérer la nature semble inévitable pour réparer les nombreux dégâts déjà causés par l’Homme. Que ce soit dans les milieux ouverts ou dans les milieux fermés, différentes espèces sont présentes. Chacune a son importance écologique et il est plus que jamais vital de protéger chacune d’entre elles.

Il est évident que le combat est loin d’être gagné ! Par exemple, à quelques kilomètres plus au sud, le bassin du Lez est à son tour victime des coupes rases dévastant sa biodiversité. En effet comme pour le Roubion, la ripisylve du Lez, abritant des arbres pour certains centenaires, est privée de son habitat forestier au profit des centrales de biomasse.  

C’est de notre devoir à tous de rester en alerte et de prévenir lorsque des changements inhabituels sont constatés sur les espaces naturels. Il faut stopper ce massacre et respecter nos forêts !

Ce stage nous a permis de nous confronter aux réalités des conflits environnementaux et territoriaux. La mise en pratique de protocoles d’inventaire a enrichi nos connaissances naturalistes et organisationnelles. Rencontrer différents interlocuteurs nous a permis de développer nos compétences relationnelles et de communication.

Nous voulons particulièrement te remercier Claude Camilli pour la confiance que tu nous as accordée, ton soutien permanent, tes encouragements réguliers et ta motivation. Ton combat, ta passion pour la préservation des habitats et ta détermination nous ont inspirées durant notre étude.

Sans oublier Etienne Crémille, sans qui, notre venue dans la Drôme n’aurait pas été possible. Merci pour ton implication, pour ta gentillesse et ton sourire. Merci à ce grand homme pour qui l’avenir est entre les mains des femmes.

Merci de nous avoir permis de rencontrer des personnes formidables, qui nous ont fait une place chez eux. Merci à Émilie et Lionel ainsi qu’à Pierre et Joël, nous avons passé d’excellents moments en votre compagnie.  

Bibliographie

Natura 2000 : https://inpn.mnhn.fr/docs/natura2000/fsdpdf/FR8201679.pdf

ZNIEFF type 1 : https://inpn.mnhn.fr/docs/ZNIEFF/znieffpdf/820030470.pdf

ZNIEFF type 2 : https://inpn.mnhn.fr/docs/ZNIEFF/znieffpdf/820030472.pdf

Contrat de rivière : https://www.smbrj.fr/contrat-de-riviere/

Article sur l’histoire des crues du Roubion : https://journals.openedition.org/physio-geo/8984

Article du Reporterre : https://reporterre.net/La-centrale-biomasse-de

France 3 “Dans la Drôme, des associations de protection de l’environnement s’inquiètent de la pratique des coupes rases” : https://france3-regions.francetvinfo.fr/auvergne-rhone-alpes/drome/dans-la-drome-des-associations-de-protection-de-l-environnement-s-inquietent-de-la-pratique-des-coupes-rases-2102503.html

1 futura-sciences.com

2 Wikipédia

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Saint-Gervais-sur-Roubion

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